Ce que je pense de tout ça
Au début de ce voyage, je vous parlais des enfants qui – à l’aide d’un jeu – mendiaient de l’argent aux passants. Certains donnent, un peu, beaucoup ou rien du tout, touristes et locaux confondus. Cet exemple n’est en fait qu’un prétexte pour vous livrer mes pensées sur ce sujet qui me tient à cœur, la mendicité.
Je n’ai de leçon à donner à personne, je veux juste partager ce que je pense (aujourd’hui, dans ma situation actuelle) ainsi que ma maigre expérience de voyageur.
Je suis absolument contre la mendicité. Tout comme je refuse que mon bonheur soit tributaire des autres, je pense qu’il est important, pour chaque personne, de se battre pour obtenir son autonomie.
L’autonomie, c’est ce qu’on est censé acquérir en grandissant, en s’émancipant de ses parents.
Réussir a être autonome, car c’est un effort, est aussi la meilleure manière pour ensuite transmettre ce qu’on a appris. Et la transmission est à mes yeux, l’une des choses les plus importantes qu’on puisse faire pour les autres.
Je suis donc contre la mendicité et il en va de même pour les actions qui l’encouragent. Elle n’aide personne sur le long terme, elle ne fait que soulager de façon très éphémère (le mendiant, ainsi que notre bonne conscience).
Et comme disait un vieux chinois:
Quand un homme a faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner un poisson. Avec un poisson il pourra manger une fois, avec la pêche il pourra manger tous les jours.
J’aimerais bien ajouter, “par contre, ne lui donne pas d’argent, il pourrait s’acheter une bouteille de vin et ne plus avoir faim”.
Certain diront que si on donne un peu d’argent à un mendient, il pourra avec l’accumulation, se payer à manger, se laver, s’acheter de nouveaux vêtements et chercher un travail. Mais lorsque je regarde autour de moi, à Paris, ici ou à Ouagadougou… j’ai du mal à croire en cette théorie. Je pense plutôt que la mendicité encourage la mendicité.
Un exemple concret, ici à Katmandou, une touriste française me raconte l’histoire suivante :
Je me promenais dans les rues de Katmandou avec une amie, quand on tombe nez à nez avec de jeunes enfants qui sniffaient de la colle. Ils étaient là, plusieurs à se défoncer la tête avec de la colle. Mon amie, écœuré par la situation, s’empressa de donner un billet de 1000 roupies, au premier qui avait tendu la main.
Si j’avais rencontré l’amie en question, je lui aurais bien mis 3 claques. Pourquoi voulez-vous que ces enfants arrêtent, si se défoncer à la colle leur rapporte en plus de l’argent ???
(pour information, 1000 NRP représente environ une quinzaine de repas dans un petit resto de rue)
Si je vous étale ici mes pensées, c’est aussi parce que je suis face à un cas de conscience. J’ai découvert au Népal, que l’Hindouisme et le Bouddhisme (les deux principales religions) encouragent la mendicité et le dons. Il est donc dans les mœurs – et plutôt bien vu – de ne vivre que de mendicité, comme le font les Sadous indiens.
Alors que faire ? Suivre mes convictions personnelles, tout en sachant que ça ne changera absolument rien, ou bien m’intégrer le mieux possible et adopter les mœurs locales ?
10 commentaires
tu as des engagements, mais tu es dans un autre pays avec une autre culture. Je pense que pour ton travail, tu dois enlever toutes tes pensées occidentales pour te rapprocher de la pensé hindouisme ou bouddhisme. Choisi cette approche, pour comprendre cette société qui déffere de la notre. Bien sur le népal ce n’est pas la france, et chaque société a sa complexité de moeurs. En france on conseil à l’étranger (hors tourisme) de s’integrer. Essaye de t’intégrer et peut etre que ton histoire, tes incertitudes, tes doutes, tes questions évoluront et influenceront ton travail. Bonne continuation.
Comme tu le dis, c’est avant tout une question de convictions personnelles. Ne pas donner, ce n’est pas de l’égoïsme et donner, ce n’est pas forcément de la générosité.
En Inde, j’avais tendance à donner à tout va, tellement la misère était présente. Finalement, 20 roupies, c’était quoi pour moi ? Et puis je me suis un peu fait taper sur les doigts et j’ai commencé à fonctionner différemment. Je donnais dans les temples et aux infirmes.
Dans le village de l’oncle de mon meilleur ami, on a acheté une cinquantaine de cahiers, stylos, feutres… Et on est allé les distribuer à leurs voisins.
Comme le dit Glen, essaie de t’ôter tes pensées occidentales de la tête. Et comme te l’a également dit Néa sur Facebook, là bas, la mendicité n’a pas du tout la même dimension qu’en occident. Le tout est que tu trouves ta place au milieu de cette culture et que tu t’y sentes le mieux possible sans oublier tes propres convictions.
Bien dit, Glen Scolan.
Intéressant point de vu, c’est ce que je tente de faire ici, lâcher mes principes et convictions.
Mais ce sujet me tenait à coeur depuis un moment et je voulais le partager bien avant que je partir ici. Cette confrontation à une nouvelle culture, encourageant la mendicité m’a justement fait réfléchir à tout ça.
D’ailleurs, il c’est entamé une discussion sur le sujet du Bouddhisme et de la mendicité là-bas : http://www.facebook.com/remi.chapeaublanc?v=feed&story_fbid=368535959716
Je te rejoins sur le principe : favoriser l’autonomie de ceux qui dépendent des autres, plutôt que les conforter dans cette dépendance. Néanmoins j’adapte mon comportement aux situations.
Je ne donne jamais aux personnes qui mendient dans le métro, car je sais qu’ils appartiennent à des groupes qui font leurs propres lois, ont leurs propres sociétés parallèles, sociétés dont je crois savoir qu’elles ne sont ni démocratiques ni républicaines et que je n’ai pas envie de financer. De plus leur méthode me déplaît d’un point de vue moral : mettre en avant la femme et le bébé, l’homme ou l’enfant mutilé (volontairement)… Instrumentaliser les personnes pour mieux apitoyer. Des méthodes que l’on retrouve partout dans le monde.
En revanche je donne aux associations humanitaires, dont je sais (j’espère) qu’elles voient à long terme, tout en soulageant les besoins immédiats. Elles pallient à mes yeux les carences du système solidaire mis en place par l’État/les États.
Enfin, dans un monde où il est nécessaire de posséder pour exister, les mendiants qui le sont par philosophie ne me sont pas antipathiques. Minoritaires, ils choisissent de dépendre d’autrui, c’est-à-dire d’être à la merci de leur prochain. Tout en restant dignes. Ils déclarent silencieusement qu’être humain, ce n’est pas forcément avoir du bien, ni être individualiste, ni être puissant. Je parle de ceux qui ont vraiment renoncé au bien-être matériel; je ne pense pas en croiser à Paris.
Pour moi, le plus important, quand je donne, c’est d’être un minimum éclairée : qui va profiter de cet argent? A quoi va-t-il servir?
Bonjour Rémi,
je trouve intéressante ta réaction face à la mendicité, et j’en suis même rassuré : j’avais développé le même genre de commentaires (http://bit.ly/c2I48m) lors d’un voyage en Inde/Népal, et j’ai beaucoup de fois éprouvé un sentiment de culpabilité quant à cette vision des choses.
J’aimerais toutefois réagir à la fin de ton article, notamment : « Il est donc dans les mœurs – et plutôt bien vu – de ne vivre que de mendicité, comme le font les Sadous indiens. »
Je suis loin d’être un spécialiste du bouddhisme ou de l’hindouisme mais je suis tout de même surpris par cette affirmation !
En France, il existe aussi des moines mendiants, qui décident de se séparer au maximum de leurs attaches matérielles, et qui dépendent donc de la générosité d’autrui pour subsister. C’est la façon dont vive certains (tous ? je ne sais pas…) moines bouddhistes également, partant très tôt le matin quémander de la nourriture. Mais cela est fait selon un ensemble de règles et de préceptes bien définis. De même pour les vrais Sadhus (j’insiste sur le « vrais », en tant que touriste on croise bien plus d’opportunistes/escrocs que de véritables moines).
Je pense qu’on a affaire ici à une autre forme de mendicité que celle que tu côtoies tous les jours et que tu évoques dans ton article. Celle dont tu parles, me semble-t-il, se rapproche plus de celle que l’on connaît ici en occident, dans le métro parisien par exemple. Et celle-ci, je n’ai aucun souvenir de l’avoir sentie intégrée aux mœurs, ni en Inde ni au Népal.
D’ailleurs en passant à Changu Narayan, tu as peut-être remarqué ce panneau sous le porche d’entrée du temple, qui dit grosso-modo « Aidez-nous à conserver notre fierté, n’encouragez pas la mendication » ?
Pour finir je rejoins Alix : n’abandonne pas tes convictions, car après tout elles te définissent, et les Népalais aimeront aussi cette différence de point de vue que tu leur apportes sur leur propre culture. Même s’ils n’y seront pas tous réceptifs au premier abord.
Bonne continuation de voyage :)
Olivier
Il faut distinguer la mendicité liée à la misère et la mendicité des moines et des saddhous. Cette mendicité est à rapprocher de la quête faite dans nos églises. Les vrais saddhous (car il y en a beaucoup qui ne pratiquent pas réellement leur religion) pratiquent l’ascèse. C’est à dire qu’ils mangent très peu et cherchent à contrôler leur mental. Certaines pratiques sont proches de la torture (comme rester le bras levé pendant des années, à la fin l’articulation est verrouillée et ne peut plus se plier!). Dans ces religions, donner à ces sages est un acte saint.
Ceci dit, je partage votre point de vue sur l’aspect négatif de l’aumône donné aux mendiants. Il faudrait un vrai système social qui les prennent en charge, les héberge et les nourrisse. Les touristes occidentaux donnent souvent des sommes d’argent délirantes qui incitent certains à ne vivre que de mendicité. Pourquoi travailler quand il suffit de tendre la main?
Je comprends ton approche, et il est bien difficile de faire la part des choses dans un endroit de culture si différente tel que le Nepal. Je ne m’y aventurerais donc pas.
Par contre, je tenais a souligner qu’il faut se méfier de l’allégorie du vieux chinois qu’il dit qu’il vaut mieux apprendre a pécher que donner un poisson, et ce particulièrement dans nos sociétés occidentales, même si le fond reste vrai.
Car le raccourci à cette dérive qu’il nous mène à penser qu’accéder à un niveau social décent ne dépend que du savoir et de la volonté. Hors on sait que la précarité marche en cercle vicieux, et que l’on est très vite emporté.
Ensuite, la métaphore de la pêche sur le point particulier du « manger pour vivre » ne s’adapte plus à nos sociétés modernes où l’homme reste majoritairement dépendant de l’industrie agro-alimentaire et/ou des cultivateurs/bouchers/maraîchers… donc de l’argent nécessaire à se procurer sa nourriture.
Enfin, a moins de donner de son temps en association ou, indirectement, donner de l’argent aux associations… qui prend le temps d’apprendre à un clodo à « pécher ».
A la réflexion, je crois que je te rejoins. On peut être contre la mendicité, ce qui ne veut pas dire que l’on soit contre les mendiants.
Le sujet est sans fin.
je pense que glen a raison
autre pays autre culture
nos yeux on un regard tellement différent
nous avons été élevé tellement différement
être autonome dans un pays ou il y a tout n’est finalement pas difficile
tu te retournes a droit a gauche
tu tend la main tu as tout a ta porté
la bas pays que je ne connais pas
il n’y a rien mendier pour eux est devenue habituel j’imagine et en même temps il y a la pensée les touriste ont tout
et nous un sentiment de culpabilité énorme par rapport a cela a leur regarde
alors donner je changera rien
ne pas donner ne changera rien
c’est vraiment un choix personelle
mais je pense que résister a un regard d’enfant qui tend une main est difficile non??
la bas ou ici ou n’importe ou dans le monde
une décision personnelle
Matthieu 25: 34-45 : » Après quoi, le roi dira … » Venez, vous qui êtes bénis par mon Père… Car j’ai souffert de la faim, et vous m’avez donné à manger. J’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire. J’étais un étranger, et vous m’avez accueilli chez vous. J’étais nu, et vous m’avez donné des vêtements. J’étais malade, et vous m’avez soigné. J’étais en prison, et vous êtes venus à moi. » Alors, les justes lui demanderont : » Mais, Seigneur, quand t’avons-nous vu… ? » Et le roi leur répondra : » Vraiment, je vous l’assure : chaque fois que vous avez fait cela au moindre de mes frères que voici, c’est à moi-même que vous l’avez fait. «